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Ni sa sœur, je dis plus, le cirque, ni Pâris ;
Et bien que née au sein d’une molle opulence,
Elle eût sur l’édredon dormi dans son enfance,
Elle affronta la mer, défia les autans,
Ainsi qu’on l’avait vue, à la fleur de ses ans,
Fouler aux pieds l’honneur, cette vaine chimère
Dont, en un rang pareil, la perte est si légère.
Elle supporta donc les flots thyrréniens,
Les rochers et le bruit des bords Ioniens,
Et ne s’effraya pas, si loin de nos rivages,
De voguer chaque jour vers de nouvelles plages.
Qu’un honnête motif de braver le danger,
Force une épouse à fuir sous un ciel étranger ;
Elle pâlit d’effroi, son courage chancelle,
Et ses genoux tremblants se dérobent sous elle.
Ce n’est que lors qu’il faut oser son déshonneur,
Que le cœur d’une femme est exempt de terreur.
L’époux ordonne-t-il ? on n’obéit qu’à peine ;
Au moment du départ, tout déplaît et tout gêne.
La sentine fait mal, le ciel tourne ; on vomit.
Sur les pas d’un amant le cœur se raffermit.
La plus timide alors affronte les orages ;
Ses mains ne craignent pas de toucher les cordages ;
Elle parcourt le pont, se plait à voir les flots,
A causer, à manger avec les matelots.

Mais est-il donc si beau, si brillant de jeunesse,
Celui dont Hippia daigne être la maîtresse ?
Qu’a-t-elle vu dans lui, pour supporter l’horreur
De s’entendre nommer la femme d’un lutteur ?
Déjà Sergiolus a droit à la réforme :
Vieux et privé d’un bras, une tumeur énorme,
Du milieu de son front de rides sillonné,
S’aplatit sous son casque et descend sur son né,
Et de ses yeux que ronge une humeur épaissie,
Distille incessamment une immonde chassie.