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jeune Maurice Busset, vous savez, le fils du syndic, et je vois qu’il tient à la main une grosse valise de cuir, tandis qu’il y avait derrière lui une personne qui faisait comme si elle essayait de se cacher. Mais, elle, est-ce qu’elle peut se cacher ? Et puis il y avait son châle qui brillait, un châle de soie, vous comprenez, et il lui brillait sur l’épaule ; oh ! il n’y aurait pas eu besoin de la lune avec elle !… Je lui dis : « Qu’est-ce que vous faites là ?… » « Oh ! Monsieur Rouge, me dit Maurice, est-ce qu’on ne pourrait pas entrer ? je vous expliquerais… » Je dis : « Attendez, » j’allume la lampe, ils entrent. Je dis encore : « Attendez, » je vais fermer la porte à clé. Et alors le petit Maurice m’a mis au courant. Il m’a demandé si elle ne pourrait pas passer la nuit chez moi et loger chez moi quelques jours ; et qu’est-ce qu’il fallait que je fasse ? J’ai dit : « Bien sûr, seulement regardez… C’est dommage, Mademoiselle, vous arrivez deux ou trois jours trop tôt… » Il y avait un tas de débris de plâtre dans le coin de la cuisine et le trou qu’on avait percé dans le mur était mal bouché. « Dommage ! » Elle, elle ne disait toujours rien. C’est seulement quelques jours après que j’ai connu les détails de l’histoire, l’histoire du Savoyard, l’histoire de l’accordéon ; ce qui lui était arrivé, à elle… Et vous comprenez bien : elle avait eu peur pour le bossu… Et c’est pendant qu’elle avait été chez le bossu. Et c’est la mère Milliquet. Elle, elle m’a dit depuis qu’elle avait bien entendu sonner onze heures (et elle savait que c’était l’heure de police), mais, quand elle est arrivée, elle n’a plus