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des maillots sans manches : c’est une grande différence. Salut, là-haut ! On le voyait. Où est-ce qu’il va comme ça, ce Ravinet ? « Oh ! disait-on, il est un peu fou. Et il y a des jours où il vaut mieux ne pas trop avoir l’air de s’occuper de lui, sinon ça pourrait mal tourner, » alors ils ont levé là-haut les bras, ou recommencent à enfoncer la lame de la pelle au ras du sol sous l’amas des petits cailloux et du sable, pendant que Ravinet est reparti et il descendait donc la Bourdonnette, où il voit sous les vernes Bolomey le pêcheur de truites avec ses bottes de caoutchouc. Bolomey, lui, remontait la Bourdonnette. Les deux hommes sont passés non loin l’un de l’autre sans rien se dire. On arrivait ensuite à l’endroit où les berges se rapprochent et là, le volume de l’eau se resserrant, elle devient plus profonde et tombe de petit étage en petit étage par des cascades que les truites remontent d’un coup de queue ; c’est pourquoi Bolomey pêchait de préférence en amont, avec ses hautes bottes de caoutchouc et son panier plat, suspendu dans son dos à une courroie ; — mais, moi, je me fous de la pêche ; ils m’embêtent, ces pêcheurs. Il fumait des cigarettes, les mains dans les poches. L’eau faisait un bruit de tambour tout en cédant à son mouvement en avant. Et puis, un peu plus loin, elle devient toute tranquille et lisse, tandis qu’elle s’élargit : c’est là que les roseaux commencent, et il y a des petites îles de gravier dans le milieu de son lit qui s’envase. Là, Ravinet a tourné à droite.

Justement Perrin le charpentier venait d’arriver devant chez