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— Oh ! non, non, a-t-il dit, n’entrez pas. Attendez que ce soit fini…

Il a repris :

— Allons plutôt voir les bateaux, puisque vous vous y connaissez.

Ils ont de nouveau marché ensemble.

Ils ont longé la grève jusqu’au chemin dans les roseaux où ils ont été d’abord l’un à côté de l’autre, mais ensuite il n’y a plus eu assez de place pour deux personnes allant de front. On a vu derrière la casquette les deux belles épaules noires aller entre les hauts panaches qui s’agitaient vivement un instant de l’un et de l’autre côté du sentier ; puis ils ont caché la casquette, ils cachent les épaules, ils cachent pour finir les cheveux noirs qui brillent au-dessus de l’oreille (c’était pendant que Décosterd était allé faire sa course) ; puis on a pu entendre la voix de Rouge :

— Ah ! c’est toujours la même chose, voilà que Décosterd a oublié de rentrer les rames.

Une autre voix :

— Tant mieux.

Ils étaient arrivés au bord de l’eau et, en effet, les rames du plus petit des deux bateaux étaient en travers des bancs ; — là, sous la haute falaise de béton, avec ses buissons, ses couloirs, ses petits pins, ses plantes épineuses ou non épineuses, des touffes d’herbe déjà haute, quelques fleurs ; et là-haut qui la surplombaient les grands sapins de la forêt pleine d’oiseaux :