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Et puis, parce qu’il voyait qu’elle n’avait plus qu’à s’en aller, ce qu’elle se préparait à faire :

— C’est si pressant que ça ?

Et il allait avec ses doigts sous sa casquette : « Charrette ! Charrette ! »

Puis :

— Si vous pouviez attendre un moment, Mademoiselle…

— Oh ! je ne peux pas…

— Que si ! je vais vite envoyer Décosterd chez Jaunin. Sûrement qu’il vous trouvera là-bas ce qu’il vous faut… Eh ! Décosterd…

Car il n’écoute plus ce qu’elle dit, il appelle ; et déjà Décosterd arrive, ayant les doigts tout gris et raides de mortier : il ôte sa casquette à la visière tellement molle qu’il a bien de la peine à la décoller de dessus sa tête :

— Tu as compris, disait Rouge… Et vous (à Juliette) laissez-moi faire, je me charge de tout… Toi, tu vas partir tout de suite. Un kilog, bon poids, tu entends ?

— Entendu.

Décosterd va se laver les mains, il va passer sur sa chemise son gilet, il part à grands pas sans se retourner.

Et Rouge, alors, car il n’y avait plus eu ici que lui et elle :

— Il vous faudrait vous asseoir, Mademoiselle… Ah ! charrette ! a-t-il dit, c’est qu’on est en réparations ; je n’ose pas vous faire entrer. Il y a trop de désordre. Mais laissez-moi toujours vous débarrasser de votre panier…