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nus, elle a brillé avec ses dents, elle a brillé avec son cou ; — tout le monde arrive, Maurice vient, Bolomey vient, Alexis vient, on voit venir Chauvy, on voit la petite Marguerite ; ils tiennent des roses en papier, on fait la haie, on lui tend les roses. Et c’est elle à présent qui s’avance derrière les garçons qui écartent le monde ; elle glisse devant nous, tandis que le bossu la suit. De nouveau il a penché la tête de côté ; ses doigts courent sur les touches…

Là-bas, sur sa falaise, personne n’avait vu le Savoyard. Elle, elle est entrée sur le pont de danse, passant sous l’écriteau qui pend à sa guirlande avec des vers de bienvenue ; — lui, là-bas, Bolomey lui-même n’avait pas su le découvrir. Elle vient d’entrer sur le pont de danse, on s’est écarté de devant elle, on faisait le cercle : — et le Savoyard ricanait là-bas sous son petit chêne aux branches traînantes, s’amusant de voir justement que Bolomey ne l’eût pas vu, bien qu’il ne fût qu’à quelques pas de lui. On a dit à Gavillet qu’il pourrait peut-être faire reposer ses musiciens, parce qu’on disait en même temps au bossu : « Et alors, comme ça, ce serait votre tour… » Et on disait aussi : « Il faudrait allumer, » tellement il faisait sombre. Elle était à présent sous le toit, parmi nous, mais cette nuit venue avant le temps était gênante ; les garçons crient : « Allez dire à l’auberge qu’ils nous donnent l’électricité ; » — lui, sur la falaise, ricane. Il voit droit au-dessous de lui comment la bataille a commencé, les deux qui sont là dans le