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échappée, se coulant d’un arbre à l’autre dans l’herbe haute du verger. Et lui est demeuré là un moment ; il a secoué deux ou trois fois la tête ; puis il lève le bras, appelant Décosterd.

Il a dit à Décosterd :

— En somme c’est tant mieux. Il faut liquider cette affaire… J’y vais tout de suite. Et il saura du moins de quoi il en retournerait s’il venait jamais m’embêter… Toi, tu m’attends ici. Je serai de retour dans une demi-heure…

Puis il a paru hésiter, s’étant alors tourné à demi vers la maison et ce fut comme si d’abord il allait céder à ce mouvement ; mais, brusquement, il cède au mouvement contraire.

Il a ramené en avant sa casquette, et, tel qu’il était là, rien que son pantalon et sa chemise sur le corps, il se met en route à grands pas.

— Toi tu ne bouges pas, avait-il dit encore à Décosterd. Et tu surveilles ce qui se passe.

Est-ce qu’elle avait entendu ? Est-ce qu’elle s’était doutée de ce qui venait de se passer ? Ou bien si c’est seulement qu’on s’ennuie ?

Si c’est qu’on est trop enfermée : — alors des images vous viennent et on finit par y céder ?

Elle avait dû entendre du moins que Rouge venait de s’en aller, comme il lui arrivait parfois de faire l’après-midi ; elle avait dû se dire aussi que Décosterd ne comptait guère et puis la place où il était, de l’autre côté de la remise, vous permettait de vous glisser dehors sans qu’il pût vous apercevoir ; —