Page:Ramuz - La beauté sur la terre, 1927.djvu/110

Cette page a été validée par deux contributeurs.

épaules et de tout le corps une fois, puis une autre fois, pour qu’elle fût portée par l’élan jusqu’où il fallait.

Lui, se tient là ; il vient sur la passerelle et lui tend la main pour l’aider à débarquer (il y avait ces deux passerelles faites de quelques pieux et de planches à claire-voie) ; il lui tend la main, mais en même temps il a baissé les yeux.

Et très vite il a commencé :

— Vous ne voyez pas ? un moment de plus…

— Et puis après ? a-t-elle dit ; comme si je ne savais pas nager !

Il tirait sur la corde du bateau, il disait :

— Ça ne fait rien. Vous ne vous en servirez plus avant qu’on l’ait réparé. On va s’y mettre tout de suite. Il y a justement Perrin qui est là, il nous donnera un coup de main. À trois, ce sera plus facile…

Il lui tournait le dos tout en parlant, ayant l’air très occupé d’amener le bateau à lui ; elle, elle avait levé les bras à ses cheveux et il y avait à ses bras comme une mousse de soleil sur leur contour et à son cou ; son corsage trop étroit avait fait sauter ses agrafes…

Lui ne la regarde pas. Il a mis ses mains autour de sa bouche, il a fait avec ses mains un porte-voix :

— Eh ! là-bas…

Par dessus les roseaux :

— Eh ! là-bas, Décosterd…

On entend une voix qui vient :