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Il ne répondit point, on l’entendit qui sanglotait, il se cachait la tête dans ses mains. Il fallut qu’elle le prît contre elle.

Mais la grosse Marie-Madeleine, dans ce même instant, sortit du clocher, sans que personne y fût monté ; d’elle-même, elle s’élança et toutes les petites cloches à sa suite.

Depuis si longtemps, plus de cloches, et les voilà qui sonnaient toutes seules, et, toutes seules, la grosse en tête et les petites à sa suite, s’acheminaient vers les hauteurs.

Elle venait de le relever, et, aussitôt qu’il avait été debout : « Viens, père, maintenant, parce qu’elle doit nous attendre » ; il avait dit oui, il osait. Mais déjà les cloches allaient, comme pour leur montrer la route.

Et ainsi, il y eut les cloches, puis il y avait Marie et son père, il y avait enfin tout le village qui venait.

Tout le village qui venait, en manière de procession, mais pas de l’espèce de l’autre, à cause du calme où ils étaient, et l’allégresse où ils étaient, malgré leurs douleurs et leurs deuils. Guère nombreux pourtant, à cette heure, bien moins nombreux que l’autre fois, mais leurs souffrances étaient oubliées. Comme si vraiment ils avaient été morts, s’ils avaient ressuscité. Le Président en tête, tout de suite après Communier, le vieux Jean-Pierre avec ses prières. Ils voyaient les prés refleurir, les rochers brillaient comme des bannières. Quelques-uns étendaient les bras, ils faisaient comme des croix avec leurs bras qu’ils étendaient. Tous qui s’avançaient consolés, jusqu’à ce Joseph Amphion, parce que voilà que, levant les yeux, il avait cru voir dans le ciel celle qu’il avait perdue.

C’était dans le moment qu’ils arrivaient à la forêt ; elle fut devant eux, ouvrant son porche peint en belles