Il disait vrai, comme on le vit dès le lendemain, qui fut le jour que Branchu ouvrit boutique. Partout, des peaux pendaient aux murs ; l’établi était couvert d’outils neufs, marteaux, tranchets, alênes ; il y avait de la poix dans un pot, et des clous plein des boîtes et aussi des chevilles.
Lui-même se tenait assis sur une espèce de chaise basse, sans dossier, et, bien qu’il fût de très bonne heure encore, ayant assujetti devant lui une petite enclume à bout rond, il tapait dessus avec son marteau.
Il faisait beau temps ce jour-là ; le soleil, qui se levait justement, régnait en haut de la montagne, d’où montaient, comme en fuite, vers les sommets du ciel, des petits nuages tout ronds ; mais on met sa main sur ses yeux, s’il faut, et d’ailleurs ce soleil ne semblait pas incommoder Branchu : vêtu de neuf, avec un beau tablier de toile verte tout neuf et une chemise de flanelle coton à rayures dont les manches étaient troussées, il avait l’air tout heureux au contraire de la lumière et du beau temps.
Voilà un homme content, on se dit, et c’est rare ; enfin un cordonnier convenable, on se dit ; plus très jeune, mais qu’est-ce que ça fait ? et d’ailleurs pas très vieux non plus, et qui a l’air d’être en santé et de ne pas marchander sa peine.
Beaucoup de gens allaient et venaient dans la ruelle ; ils pensaient : « Ça nous change du père Porte ; quel vieux dégoûtant c’était là ! »
Il faut dire que cette ruelle est une des plus fréquentées du village : hommes, femmes, enfants, tout le temps il y passe du monde ; midi n’avait pas encore sonné que personne n’ignorait plus que Branchu s’était mis au travail.
Pourtant il s’écoula bien quatre ou cinq jours avant que la pratique vînt. On a ceci dans l’esprit qu’on