Page:Rameau - La Vie & la Mort, 1888.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.

LE REFUGE DU DIABLE



Sa Magesté le Diable, empereur de la Terre,
Par la queue en suspens,
Au haut d’un pin songeait, morose et solitaire,
En forgeant des piquants pour arbustes grimpants
Et des dards pour serpents.

Or, il avait pourvu tous les aigles de serres
Et tous les fruits de vers,
Inventé les grêlons, les forbans, les faussaires,
Les tigres, et, dit-on, lâché sur l’univers
Las ! les faiseurs de vers !

Bref, il ne savait plus, ne trouvant rien de pire
Par quoi continuer,
Quand il vit tout-à-coup, sur son terrestre empire,
Deux mille millions de mortels le huer,
Et vers lui se ruer !

« Mort au Diable ! mort ! mort ! hurlait la foule affreuse,
Assez de ses exploits ! »
Et noire, elle approchait, approchait, plus nombreuse,
Bondissant des ravins, et des monts, et des bois,
Vers le diable aux abois.