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physiques, il tomba dans le plus grand abattement et écrivit au conseil sur un tout autre ton :

Il y a bien trois semaines que je désire et demande avoir audience et n’ai jamais pu l’avoir. Je vous supplie pour l’amour de Jésus-Christ ne me refuser ce que vous ne refuseriez à un Turc, en vous demandant justice. J’ai à vous dire choses d’importance et bien nécessaires. — Quant à ce que vous aviez commandé qu’on me fit quelque chose pour me tenir net, n’en a rien été fait et suis plus piètre que jamais. Et davantage le froid me tourmente grandement à cause de ma colique et rompure, laquelle m’engendre d’autres pauvretés que j’ai honte à vous écrire. C’est grande cruauté que je n’aie congé de parler seulement pour remédier à mes nécessités. Pour l’amour de Dieu, messeigneurs, donnez-y ordre, ou pour pitié ou pour le devoir.

En réponse à cette requête, le conseil envoya deux de ses membres prendre connaissance des communications de Servet, et décida qu’il lui serait fait les vêtements nécessaires. Quinze jours plus tard, le 26 octobre 1553, le conseil était assemblé pour décider définitivement du sort de Servet. Amy Perrin fit un dernier effort pour le sauver. Il demanda ouvertement que Servet fût déclaré innocent et absous. Cette proposition fut écartée. Il demanda ensuite que la cause fût portée au conseil des Deux-Cents, qu’il savait plus hostile à Calvin ; mais ici encore son éloquence et son crédit échouèrent. La partie flottante du Petit conseil, en-