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et la souille et toute pénétrée de reconnaissance et de repentir.

Qu’on se figure M. Renan rêvant sa Magdelaine, puis tombant sur un volume de Béranger, l’ouvrant au hasard et y lisant ce refrain :

Coulez, bons vins ; femmes, daignez sourire.
Et l’univers est consolé !

Quelle chute, grand Dieu ! Et que sera-ce si au lieu d’un refrain qui a sa grâce et son rayon, il venait à rencontrer cette triste chanson des deux Sœurs de charité, qui heurtent à la porte du ciel, l’une portée sur les ailes des anges,

L’autre dans les bras des amours… ?

Il n’y a pas de mépris plus souverain que celui du grand art idéal pour les gentillesses égrillardes qui usurpent le nom de poésie. Ce mépris, c’est celui de M. Renan pour Béranger.

Toutefois il est bien probable que si Béranger n’avait jamais chanté d’autres refrains, les foudres de M. Renan ne se seraient pas égarées jusqu’à lui. Pour lui valoir l’honneur de les attirer, il n’a pas fallu moins que ses hymnes déistes. La théologie de Béranger, tel est proprement le sujet de l’article qui nous inspire ces réflexions. M. Renan semble avoir eu de la peine à se remettre de son étonnement,