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ne les accompagne que comme « condition du genre », et l’on s’étonne à la lecture de voir combien la combinaison y empiète sur la véritable création poétique. J’oserai étendre cette remarque à d’autres morceaux, quelques-uns charmants. Les Etoiles qui filent sont une ravissante idylle. Mais le motif en est de ceux qui ont besoin d’être relevés par l’adresse de l’esprit. En lui-même, il a peu d’originalité. On en tirerait tout ce qu’on voudrait. Il n’y aurait qu’à passer en revue, à propos de chaque étoile filante, tous les âges de la vie et toutes les conditions de la société. De tels motifs se laissent dévider sans fin, comme un chapelet. De même pour le Petit oiseau, que le poëte voudrait bien être, et qui irait ici, puis là, puis ailleurs. Gracieuses guirlandes, dont chaque fleur est une strophe. La main qui les a assorties est celle d’une adroite bouquetière. Mais encore lui a-t-il fallu pour les retenir un fil toujours cassant. Où est d’ailleurs la guirlande qui vaille une seule plante, une plante animée du souffle de la vie, avec ses feuilles, ses tiges, son port, ses boutons naissants, ses fleurs épanouies, son parfum distinct, la rosée qui brille dans son calice, le miel qu’elle distille, et le vent qui la berce ? Aux esprits ingénieux, les guirlandes à tresser ; aux seuls et vrais poètes, la plante à voir en rêve et à faire vivre dans leurs vers.

M. Renan est trop artiste pour ne pas avoir senti