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table nécessité d’emporter la place du premier assaut ou de s’y briser les reins. Pascal n’aurait pas eu besoin de vivre autant qu’un patriarche pour s’en assurer lui-même. Cent ans après sa mort paraissait la Profession de foi du vicaire savoyard, qui répond en ces termes au dilemme de Pascal :

Je vous avoue aussi que la majesté des Ecritures m’étonne ; la sainteté de l’Evangile parle à mon cœur. Voyez les livres des philosophes avec toute leur pompe ; qu’ils sont petits près de celui-là ! se peut-il qu’un livre à la fois si sublime et si simple soit l’ouvrage des hommes ? Se peut-il que celui dont il fait l’histoire ne soit qu’un homme lui-même ? Est-ce là le ton d’un enthousiaste ou d’un ambitieux sectaire ? Quelle douceur, quelle pureté dans ses mœurs ! quelle grâce touchante dans ses instructions ! quelle élévation dans ses maximes ! quelle profonde sagesse dans ses discours !… Avec tout cela ce même Evangile est plein de choses incroyables, de choses qui répugnent à la raison, et qu’il est impossible à tout homme sensé de concevoir ni d’admettre. Que faire au milieu de toutes ces contradictions ?

Evidemment le dilemme de Pascal n’avait plus de prise sur Rousseau. Il avait cédé comme un ressort trop tendu.

De nos jours il a cédé plus encore. La critique moderne ne l’accepte plus. Elle a trouvé moyen d’échapper aux étreintes convulsives de Pascal. Elle nie les prophéties, les miracles, les figures ; mais elle ne les traite pas pour cela de sottises. Elle a trop d’intelligence et de savoir-vivre. Métaphore, dit-elle,