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orgueil de cette raison qu’un vent manie et qui ose parler de ses droits, elle lui crie : « Viens à moi, et si tu veux courber la tête, je te rendrai capable de connaître ; fides praecedit intellectum. »

Que la philosophie proteste contre des prémisses de cette nature, je n’ai pas de peine à le concevoir. Pour les admettre, il lui faudrait abdiquer. Aussi s’efforce-t-elle d’établir que les avocats du christianisme, en condamnant la raison à l’impuissance, se condamnent eux-mêmes au néant ; qu’ils ruinent la base nécessaire et universelle sur laquelle repose toute foi, et la foi chrétienne aussi bien qu’une autre ; qu’ils font une œuvre qui les trompe : elle s’efforce d’établir que la vérité n’est quelque chose que par ses rapports avec l’intelligence, et que nier l’aptitude de l’intelligence à découvrir la vérité, c’est du même coup nier la vérité.

Il est fort naturel que M. Cousin le philosophe ait sonné l’alarme en voyant la raison si fièrement éconduite. Je crains seulement qu’il n’ait pas bien choisi le texte et l’occasion de ses fameuses plaidoiries en faveur de la justesse de l’esprit humain. Car, enfin, Pascal est-il l’inventeur de ce système d’apologie qui fustige la raison au bénéfice de la foi ? Non, Pascal l’a trouvé tout formé et dès longtemps. Les Pères de l’Église et les docteurs du moyen âge le connaissaient déjà ; ils l’ont employé avec plus de