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vaincre et toucher que la beauté morale du divin sacrifice. Aujourd’hui c’est l’inverse. Si donc le christianisme veut reconquérir le monde, il faut, bon gré mal gré, qu’il se présente précisément par son côté philosophique et moral, il faut qu’il compte surtout sur la puissance de l’idée.

Peut-être un pareil système d’apologie présente-t-il d’assez sérieux dangers ; mais nous n’avons pas à nous en occuper ici. Il nous suffit de remarquer qu’en ce point Pascal est d’accord avec l’esprit des temps où nous vivons.


On connaît le portrait qu’a fait Pascal de la nature humaine. L’homme, éternel objet de ses propres études et de ses propres discours, s’est tour à tour exalté comme le roi de la création, et rabaissé au niveau des plus misérables créatures. Il s’est, de ses propres mains, attribué le sceptre de l’univers, et de ses propres mains, il s’est anéanti dans la poussière. Il s’est prodigué insultes et flatteries. Mais qu’est-il en réalité ? C’est la grande question.

Matériellement, il se trouve placé entre deux infinis, c’est Pascal qui l’affirme. S’il envisage l’immensité de la création, il est forcé d’avouer que sa présence dans le grand tout est moins sensible que celle d’une goutte d’eau dans les flots de l’Océan. Sur le globe qu’il habite, il n’occupe qu’une place imperceptible ; ce globe lui-même n’est qu’un grain