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nel, destiné tout simplement à faciliter la consultation. Peut-être un Pascal semblable serait-il peu lu ; mais il n’en serait pas moins précieux. Il est fort désagréable de n’être jamais en tête à tête avec Pascal, d’être toujours introduit auprès de lui, tantôt par Condorcet ou Voltaire, tantôt par M. Havet ou M. Astié. Si habiles que soient ces messieurs, ils n’en sont pas moins des introducteurs, des cicérone dont les uns dénigrent, dont les autres louent. Je les crois tous de fort bonne rencontre, M. Astié surtout ; mais qu’ils me laissent donc approcher librement du dieu. Je ne veux pas de prêtre entre Pascal et moi.

Passe encore s’il était réellement possible de retrouver le plan de Pascal ; mais non, la possibilité n’en existe pas. Un simple fait, dont M. Astié se préoccupe trop peu, suffit, ce nous semble, à le démontrer. Pascal n’était pas seulement un grand chrétien, il était encore un grand artiste. Sans qu’il eût beaucoup étudié les questions qu’agite et embrouille la rhétorique il avait, par le seul instinct du génie, promptement découvert les quelques principes de l’art d’écrire qui sont au-dessus des révolutions de la mode et des caprices du goût. Le même instinct, guide plus sûr que tous les raisonnements du monde, l’obligeait à travailler et à retravailler sans cesse ses œuvres. Il est telle Provinciale qu’il a remise plus de dix fois sur le chantier. En approfondissant son idée afin de l’exprimer avec plus de