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convergent vers une transformation du mariage »[1] : et c’était bien cette même notion du féminisme que l’on trouvait déjà dans Saint-Simon et Stuart Mill. Les pays où le socialisme s’implante avec le plus de force et le plus de liberté, ne sont-ils pas de ceux aussi où la stérilité volontaire du néo-malthusianisme, par la corruption de l’idée naturelle et chrétienne du mariage, fait le plus de progrès ? Témoin la France, l’Australie et la Nouvelle-Zélande[2].

Le socialisme est si peu chrétien d’origine et d’instincts que, parmi les innombrables utopies que nous pourrions énumérer, il ne s’en trouve qu’une qui soit chrétienne — et encore est-elle protestante — c’est celle du pasteur de Souabe, Andreæ[3] : car nous ne parlons ici ni du badinage mythologique du grand Fénelon, ni de cet exemple unique au monde par lequel les missionnaires du Paraguay montrèrent que l’Évangile, s’il est importé chez des tribus sauvages, ne les oblige point à répudier ce qu’il y a encore de naïf et d’inculte dans leurs mœurs.

Nous ne revenons pas sur l’esprit de communauté qui a régné d’une manière très passagère dans la primitive Église de Jérusalem. On ne saurait y voir le moins du monde un régime économique : ce n’était que la réalisation des biens et la consommation dû capital par les œuvres de charité, ainsi, qu’il s’est toujours pratiqué et se pratique encore au sein des communautés religieuses[4]. Il fallait, pour l’exemple des siècles à venir, que la perfection évangélique qui venait d’être révélée à titre de conseil — Si

  1. Destrée et Vandervelde, le Socialisme en Belgique, 2e éd., 1903, pp. 350-356 et en particulier p. 351.
  2. Voyez à cet égard Pierre Leroy-Beaulieu, les Nouvelles sociétés anglo-saxonnes, s. d. (1902), et Albert Métin, le Socialisme sans doctrines : Australie et Nouvelle-Zélande, 1901.
  3. Voyez plus haut, p. 623.
  4. « Nec quisquam eorumquae possidebat, aliquid suum esse dicebat : sed erantillis omnia communia… neque enim quisquam egens erat inter illos : quotquot autem possessores domorum aut agrorum erant, vendentes afferebant pretia eorum quoe vendebant et ponebantante pedes apostolorum : dividebatur autem singulis prout cuique opus erat » (Actes des Apôtres, iv, 32-35).