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gisme qui a fait fortune — a pour cause l’institution de l’héritage, en vertu de laquelle les uns naissent propriétaires et les autres prolétaires. Il faut donc que tous les biens, au décès de leurs maîtres, reviennent à l’État, pour que celui-ci, après avoir classé les individus suivant leurs capacités, les rétribue ensuite suivant leurs œuvres. Ce sera ainsi, non pas l’égalité à la façon de Rousseau, mais la hiérarchie. Les biens-fonds n’auront que des possesseurs viagers. De la sorte on aura supprimé le scandale du riche oisif, en même temps que l’on aura assuré l’accroissement de tous les produits par cette exploitation plus féconde et mieux entendue des richesses naturelles. «  Nous voulons, disait le Globe du 9 février 1830, un ordre social complètement basé sur ce principe ; « À chacun selon sa capacité, à chaque capacité selon ses œuvres ». Nous voulons, ceci est clair, la suppression graduelle de tous les tributs que le travail paye à l’oisiveté sous les noms divers de fermage des terres, loyer des usines et des capitaux. » Finalement la théorie unitaire et communiste s’affirme sans ambages[1]. La totalité des produits annuels de l’industrie sera l’actif du budget de l’État : pour les répartir, l’État sera une vaste banque générale, unitaire et directrice, qui les distribuera entre, les banques secondaires adaptées aux divers besoins.

Pour les saint-simoniens, comme pour les socialistes cathédrants, c’est l’État qui est le moteur du progrès et de la vie sociale. C’est en effet à l’État que doivent appartenir « la détermination du but de l’activité des sociétés et des efforts nécessaires pour l’atteindre ; la direction à donner à ces efforts, soit dans leur division, soit dans leur combinaison ; le règlement de tous les actes collectifs et individuels ; celui enfin de toutes les relations des hommes entre eux, depuis les plus générales jusqu’aux plus parti-

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  1. Voyez surtout le manifeste de Bazard et Enfantin, adressé à la Chambre des députés le 1er octobre 1830 (Reybaud, op. cit., éd. de Bruxelles, 1849, t. I, pp. 113 et s.)