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était restée le plus en retard ; et il est convaincu, d’un autre côté, que les richesses, sous le régime actuel du libre travail, vont à une moindre inégalité. Pour la France, cette thèse est d’une incontestable exactitude. M. Leroy-Beaulieu l’appuyait sur des observations fort judicieuses, que les années n’ont fait depuis lors que confirmer. En ce qui concerne les salaires, il maintient une certaine influence du rapport entre les capitaux et la population ; mais il s’attache surtout à montrer l’action qu’exerce la productivité du travail ouvrier, quand cette productivité est modifiée, soit par des conditions naturelles locales, soit par des progrès techniques d’un ordre quelconque. Il faut enfin tenir compte de l’avantage que les lois ou les mœurs donnent à l’une des parties contractantes dans la discussion du contrat de travail. En tout cas, le rapport nécessaire entre la productivité du travail et le salaire de l’ouvrier suffirait pour opposer un obstacle insurmontable à tous les projets d’unification des salaires et de législation internationale du travail[1].

La Colonisation chez les peuples modernes, le Traité de la science des finances, excellent mélange de principes et d’exemples, dans lequel nos procédés actuels de gaspillage financier sont justement critiqués ; le Précis d’économie politique, très court, mais non moins substantiel ; l’État moderne et ses fonctions, œuvre d’actualité où M. Leroy-Beaulieu, tout en combattant très énergiquement le socialisme d’État sous quelque forme et par quelque fissure qu’il pénètre dans nos lois, ne reste pas cependant dans les formules trop étroites d’Adam Smith ou de Bastiat sur le rôle du souverain ; le Collectivisme ou examen critique du nouveau socialisme, travail de ferme et solide

  1. Comparez, dans l’Ouvrier américain de M. Levasseur, 1898, t. I, les causes des salaires élevés, en Amérique. Elles y sont, d’après lui : 1° la productivité du travail ; 2° le standard of life élevé que cette productivité lui a permis de se faire. C’est le désir de conserver ce salaire et ce standard of life, qui rend l’ouvrier américain protectionniste.