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5° La progression de la rente sera empêchée par le développement de la richesse et les améliorations agricoles, qui combattront d’autant la formule des revenus décroissants (mais ceci, chez les ricardiens, n’était qu’une interpolation, destinée à garantir Ricardo contre les démentis éventuels que l’avenir pouvait lui donner et lui a donnés effectivement), Ricardo avait également prévu le cas où des terres nouvelles seraient disponibles. — Or, dit Carey, de deux choses l’une : ou celles-ci sont meilleures, et pourquoi n’a-t-on pas commencé par elles ? ou bien elles sont moins bonnes, et alors en quoi troublent-elles les calculs de Ricardo et la pleine réalisation de ses pronostics[1] ?

6° Les perfectionnements de l’art agricole retardent la rente ; donc l’intérêt du cultivateur, qui est de les désirer et de les chercher, est en conflit perpétuel avec celui du propriétaire, qui doit les craindre. — Ce serait là une théorie désespérante ; mais elle est fausse, puisque le pouvoir de la terre a commencé et grandi à mesure que l’homme plus fort pouvait cultiver des sols plus fertiles ; ce pouvoir ne diminuera donc pas d’une manière absolue, quand on saura rendre fertiles par le travail des terrains qui ne l’étaient pas par la nature[2].

La réfutation de Ricardo, sur laquelle nous nous sommes appesanti, prépare celle de Malthus. Si la culture a commencé par les terres maigres pour n’atteindre que plus tard les sols fertiles et profonds, la loi des rendements au moins proportionnels se substitué aisément au pessimisme malthusien.

Contre Malthus, Carey objecte encore que l’accroissement de la population accroît les facilités de produire, soit à cause d’une division plus grande des professions et du travail, soit à cause d’une organisation sociale plus productive, particulièrement par un meilleur emploi des

  1. Ibid., p. 71.
  2. Ibid., pp. 72-73.