nécessité d’un retour du change aux cours du pair est incompatible avec la théorie de Ricardo sur la valeur internationale et sur l’ajustement des pouvoirs de la monnaie. Et ici, c’est à Ricardo que l’expérience de la fin
chiffres. Je suppose que les douanes françaises de Marseille, de Cerbère et d’Irun ont constaté une sortie de 100 millions de francs en marchandises allant de France en Espagne et une entrée de 200 millions de francs de marchandises venant d’Espagne en France. Nous admettons que les prix de la statistique administrative soient les prix exacts des contrats, que les transports soient faits en proportions égales par chacune des deux nations et que le change à Paris sur Barcelone et Madrid cote 35 % de perte (c’était vrai à l’heure où nous écrivions ces lignes). En ce cas, les deux pays régleront leurs opérations par traites payables au domicile de l’acheteur, c’est-à-dire payables à Paris pour les marchandises espagnoles et à Madrid ou Barcelone pour les marchandises françaises. Puis, dans la prévision de la perte au change, les négociants français auront vendu en dessous du pair de la monnaie espagnole, et au lieu d’être créanciers de 100 millions de piécettes, ils le seront de 135 millions ; Inversement les marchandises espagnoles importées en France et évaluées en monnaie française par la douane française, auront été vendues au dessus du pair de la monnaie espagnole ; elles auraient valu 270 millions de piécettes en Espagne, pour être seulement vendues 200 millions payables en France, parce que ces 200 millions sont représentés en Espagne par des traites sur Paris, qui sont susceptibles, à Madrid, d’être vendues pour 270 millions de piécettes. — À considérer les statistiques douanières, on ne voit pas autre chose. Mais, si l’on fait intervenir la théorie de la valeur internationale, le problème est bien autrement complexe : alors, en effet, il s’agit d’apprécier les différences relatives des coûts de chacune des marchandises sortant de l’un des deux pays pour aller dans l’autre ; il s’agit également d’apprécier le pouvoir de la monnaie dans l’un et l’autre pays. — Alors une autre hypothèse se présente aussi à l’esprit. Si la douane française évalue les importations à 200 millions de francs, et si la piécette vaut théoriquement le franc, qu’est-ce qui prouve que la douane espagnole ait évalué ses exportations à plus de 200 millions de piécettes (c’est-à-dire à plus de 148 millions de francs) ? Il semble naturel qu’elle n’ait pas évalué, à beaucoup près, ses exportations à 270 millions de piécettes : car, la monnaie étant plus rare en Espagne qu’en France, il pourrait paraître étrange que la piécette y eût un moindre pouvoir que le franc en France. S’il en est ainsi, l’écart qui nous apparaît de 100 millions de francs dans la balance du commerce, ne sera plus, en France, que de 48 millions de francs et en Espagne de 65 millions de piécettes. — Enfin, dans ce qui précède, nous avons supposé que le vendeur français laisse à l’acheteur espagnol toute la perte au change. Or, il n’est pas sûr qu’il en soit ainsi, et dans ce cas malgré une vente de 100 millions de francs, ce sera pour moins de 135 millions de piécettes qu’il sera tiré sur l’Espagne. On sait, en effet, que l’industrie abaisse souvent ses prix pour l’exportation lointaine, afin de garder une production abondante qui laisse appliquer la loi du revenu plus que proportionnel. Même à l’intérieur, la même pratique est souvent observée : par exemple les Compagnies de mines ont des zones concentriques de débouchés à prix décroissants ; et celles de Saint-Étienne vendent plus cher à Saint-Étienne que sur vagon à destination de Lyon (à cause de la concurrence du bassin de Saône-et-Loire)