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sans que nous entrions dans cette analyse, on conçoit que, dès que la théorie est acceptée, les choses doivent se passer de même dans ces cas là, quoique avec des complications toutes nouvelles, à travers lesquelles on sera amené à conclure que « plus le nombre des pays pratiquant l’échange est grand, et mieux se répartissent les avantages qui en dérivent[1] », puisque les hypothèses des inégalités de coûts comparatifs doivent bien davantage se réaliser.

On a vu plus haut que l’avantage de l’échange international se résout — avec la formule de Ricardo et de Stuart Mill, comme avec celle de Bastiat — en une économie de travail total. La question la plus délicate est celle de savoir comment va se partager cette économie. La thèse un peu trop simpliste de Bastiat admettait que le gain fût pour tout le monde ; mais la théorie anglaise n’oblige pas à le penser. Il y a un gain sans doute : toutefois, il peut ou bien se partager, soit également, soit inégalement, entre les deux pays, ou bien, au contraire, aller entièrement à l’un des deux. La solution, d’après Stuart Mill, est commandée :

1° Par la nature des industries dont les produits sont échangés entre eux, selon que ces industries obéissent à la loi du rendement plus que proportionnel ou bien qu’elles sont au contraire, placées sous le régime des revenus décroissants[2]. L’avantage, ici, sera pour les pays dont l’exportation répondra à la première hypothèse[3]. D’où cette conséquence, dans l’opinion de Stuart Mill, que ce seraient

  1. Fontana-Russo, Politique commerciale, p. 47.
  2. Op. cit., 1. III, ch. xviii, §§ 4-5, t. II, pp. 124 et s.
  3. Unsettled questions et Principes d’économie politique, 1. III,. ch. xviii, § 2, t. II, p. 121. « Il est possible de concevoir un cas extrême dans lequel tous les avantages de l’échange profiteraient à une seule des deux nations, sans que l’autre y gagnât rien. » — Item, Principes, loc. cit., § 4, p. 125 : « Si l’on demande lequel des deux pays retire le plus grand avantage du commerce avec les autres, il faut répondre : le pays dont les produits sont le plus demandés dans les autres et dont la demande est le plus susceptible de s’étendre par l’abaissement du prix. » — Item, Bastable, Théorie du commerce international, tr. fr., pp. 37 et s.