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crise générale de surproduction ? Sismondi, tout d’abord, n’avait pas discerné ces deux cas : mais plus tard il prit résolument parti pour la thèse des crises générales, plus rares cependant, dit-il, que les crises partielles[1].

C’était se mettre nettement en révolte contre l’autorité de J.-B. Say[2]. Comment ces crises générales sont-elles donc possibles ? La réponse semble bien simple. Dans toutes les branches de commerce, les besoins des acheteurs, quoique indéfinis, sont extérieurement limités par les moyens de payer dont ces acheteurs disposent, car ce qui importé, c’est le revenu et non pas la production[3] ; puis, en chaque ordre de produits, ces besoins sont limités aussi par le temps qu’exige l’usure ou la consommation de chaque richesse. La surproduction qui cause la baisse des salaires et qui diminue le revenu de la majorité des ménages, agit donc sur elle-même pour se rendre plus intense, parce qu’elle resserre la demande en même temps qu’elle élargit l’offre même. Le grand nombre d’individus mal nourris, mal vêtus et mal logés ne prouve rien contre la surproduction générale. Ainsi, en résumé, la surproduction est funeste aux ouvriers comme aux entrepreneurs ; pour les uns comme pour les autres, elle présente ce caractère, que l’équilibre une fois dérangé va de lui-même en se dérangeant davantage jusqu’aux pires souffrances.

    plus rapidement que les manches à balai ne transportaient l’eau sans se soucier si le réservoir était plein. Chaque, nouvelle découverte, comme la hache de Gandalin, abat l’homme-machine, mais pour en faire relever quatre, huit, seize à sa place, la production continue à s’accroître avec une rapidité sans mesure » (Études, t. I, pp. 60 et 61).

  1. Éclaircissements relatifs à la balance des consommations avec les productions, à la suite des Nouveaux principes, t. II, p. 404.
  2. Voyez Lettres à Malthus, pp. 443 et s. (Supra, pp. 286-287).
  3. Sismondi fait de cette formule un « principe nouveau… plus important qu’aucun autre »… à savoir que « l’augmentation de la production de tous les objets de nos besoins et de nos désirs n’est un bien qu’autant qu’elle est suivie d’une consommation correspondante ; qu’en même temps l’économie sur tous les moyens de produire n’est un avantage social qu’autant que chacun de ceux qui contribuent à produire continue à retirer de la production un revenu égal à celui qu’il en retirait » (Éclaircissements, t. II des Nouveaux principes, p. 369).