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sens, échappe au reproche de contradiction qui lui a été si souvent adressé[1].

II. — Angleterre.

En Angleterre, la littérature économique resta d’une étonnante fécondité. Ce sont ces écrivains que les Allemands appellent les Épigones, en souvenir de la mythologie grecque, qui avait donné ce nom aux fils et successeurs des sept chefs devant Thèbes.

Le disciple le plus immédiat et le plus fidèle de Ricardo fut James Mill, dont le fils Stuart Mill devait illustrer davantage le nom[2], James Mill, préludant à cette diversité de travaux qui sera un des caractères de son fils, a donné, comme historien, une Histoire des Indes anglaises (1817) ; comme économiste, des Éléments d’économie politique (1821), qui ne sont, qu’un résumé des théories de Ricardo, sans grandes vues et sans originalité ; comme philosophe enfin, une Analyse de l’esprit humain (1829) et un Essai sur le gouvernement. Dans ce dernier ouvrage, James Mill conclut d’une manière fort radicale au gouvernement du pays par le pays, au moyen du suffrage universel, qu’un système bien préparé d’éducation aurait dû, au préalable, rendre possible et éclairé. Très radical comme on le voit, James Mill ne poussait pas non plus très loin le respect de la propriété. Mais nous reviendrons sur ce point[3]. James Mill est un esprit de second ordre, enclin comme son fils à l’abus de la méthode métaphysique dans les sciences sociales.

  1. Pour cette question de la prohibition de l’intérêt par l’Église et pour l’introduction de la permission ou tolérance actuelle, voyez nos Éléments d’économie politique, où le sujet est traité avec plus de détails (2e édit., pp. 469 et s.). — Voyez Pagès, Dissertation sur le prêt à intérêt, Lyon, 1820.
  2. James Mill (1773-1836), fils d’un cordonnier écossais, avait été destiné à la carrière ecclésiastique, grâce aux libéralités de sir John Stuart de Fettercairn, qui lui fit faire ses études à l’Université d’Edimbourg. En 1802, il vint à Londres avec son protecteur, tourna au scepticisme philosophique et se lia avec Ricardo et Bentham. Il avait obtenu en 1819, dans les bureaux de la Compagnie des Indes, une place qui lui rapportait 50.000 francs, somme énorme surtout pour l’époque.
  3. Infra, 1. IV, ch. v, § 4.