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des pages fort instructives. Adam Smith y traite de l’argent considéré comme capital et des papiers de crédit, chapitre long et lourd, où se trouve, cependant, la belle comparaison, fréquemment citée, entre les papiers de crédit et les routes en l’air, lesquelles rendraient autant de services que les routes sur terre, en ayant sur elles l’avantage de ne point enlever de terrain à la culture ; il y traite de la distinction du travail productif et du travail non productif, distinction qu’il n’aurait point faite s’il n’avait pas matérialisé avec un certain excès les idées d’utilité et de richesse[1] ; il y traite encore des fonds prêtés à intérêt et enfin des différents emplois des capitaux.

Mais des passages fort remarquables disséminés çà et là ne laissent pas de captiver l’attention. Nous citons les vues sur la formation du capital[2], les critiques de la prodigalité des gouvernements comparée à celle des particuliers[3] et l’exposition des causes qui font baisser le taux de l’intérêt. Est-ce l’augmentation de la quantité du métal ou des instruments de paiement ? Non ; et Smith, qui combat fort judicieusement Locke, Law et Montesquieu, conclut que ce qui fait baisser le taux de l’intérêt, c’est « la portion du produit annuel[4] qui est destinée à remplacer un capital que le producteur ne se soucie pas de prendre la peine d’employer lui-même[5] ».

Là s’arrête ou plutôt s’interrompt la partie vraiment didactique de l’œuvre.

Le livre III, qui décrit « la marche différente des progrès

  1. List a vivement critiqué cette distinction qui, à tout prendre, sent peut-être encore un peu trop chez Adam Smith l’influence de ses relations avec les physiocrates. — Voir à ce propos l’excellente discussion que M. Maurice Block a faite de cette théorie un peu étroite, dans ses Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 2e édition, t. I, p. 388. — J.-B. Say, dans le Discours préliminaire de son Traité (2e édition, 1814, p. LIV), critique aussi fort bien Smith sur ce point.
  2. Loc. cit., I, II, ch. III, pp. 422 et s.
  3. Ibid., pp. 428 et s.
  4. Pourquoi « annuel » seulement ?
  5. Ibid., 1. Il, ch. iv, pp. 440-444.