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bileté et de la dextérité des travailleurs ; 2° de la « proportion entre le nombre de ceux qui sont occupés à un travail utile et de ceux qui ne le sont pas ». Ici perce déjà citez Adam Smith la tendance à ne voir l’utilité que dans la matière et dans les transformations physiques qu’elle peut subir, avec un dédain peut-être exagéré pour les efforts de l’esprit, fussent-ils dirigés vers la production des biens économiques. On aurait pu lui demander, ce semble, et avant toutes choses, à quoi se reconnaît l’utilité d’un travail[1].

Smith annonce ensuite le plan de son ouvrage. Un premier livre sera consacré aux « causes qui perfectionnent le pouvoir productif du travail » et à « l’ordre suivant lequel ses produits se distribuent naturellement » (il y aura donc là tout à la fois de la production, de la répartition et de la circulation). Puis il remarque — sans beaucoup de raison — que la proportion des travailleurs utiles et productifs par rapport aux non-travailleurs « est partout en proportion de la quantité du capital employé à les mettre en œuvre et de la manière particulière dont ce capital est employé[2] ». Voilà le mot « capital » qui intervient : il faut l’expliquer, et ce sera le sujet du deuxième livre. Ce sont ces deux premiers livres qui renferment vraiment le système économique de Smith ; Le livre III parlera du développement inégal et non proportionnel des industries aux différents âges et particulièrement des villes et des campagnes ; le livre IV, des différentes théories d’économie politique déjà constituées ; le livre V, du revenu du souverain et par conséquent de l’impôt.

Tel est le plan, et nous allons voir, avec quelques détails de plus, comment il a été suivi.

Smith entre brutalement en matière par la division du

  1. List sera un de ceux qui tireront le plus avantage de cette tendance à n’envisager que le côté matériel du travail et les œuvres seulement du corps. Voyez plus bas, même livre, ch. VII.
  2. T. I, p. 3.