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Ce qui est certain, c’est que Dupont félicite Quesnay d’être « parti de l’intérêt calculé des hommes pour arriver aux résultats que dicte sévèrement leur droit naturel, et d’avoir commencé à constater la sanction physique et impérieuse des lois naturelles — ce qui l’a conduit à en reconnaître la justice — », tandis que « les écrivains moraux et politiques, s’ils ont très bien fait sentir la justice de quelques unes de ces lois, ont toujours été embarrassés pour trouver la sanction physique de ces mêmes lois[1] ».

Mais en même temps que nous protestons ici contre la subordination de l’éthique à l’économique, nous n’acceptons pas davantage entre ces deux sciences un ordre inverse de hiérarchie. Nous maintenons donc la formule enseignée ailleurs par nous, à savoir que, si l’homme doit demander d’abord à la morale de lui dicter sa conduite, ce n’en est pas moins à l’économie politique seule, et non subordonnée à la morale, qu’il doit demander ensuite quelles vont être, dans l’ordre des prévisions humaines, les conséquences économiques que ses actes vont entraîner après eux ;

4° L’optimisme exagéré. Là encore, convenons-en, il y eut chez les physiocrates quelque chose de cette illusion et de cette ardeur communes à presque tous les auteurs de grandes découvertes et à tous les fondateurs de systèmes nouveaux. Mais — dirons-nous aussi — que ceux-là jettent la première pierre à l’école physiocratique, qui n’ont pas promis la régénération sociale et le bonheur de l’humanité par la mirifique vertu d’une formule de leur invention !

— De tout cela on a rejeté les thèses morales, l’exagération du laissez-faire et l’optimisme sans limites basé sur


    à accroître nos droits par l’extension de nos devoirs, dont l’acquit sera toujours au profit de tous, c’est-à-dire que plus nous travaillerons, plus nous profiterons, plus nous ferons bien, plus nous nous trouverons bien ; et notre travail, notre profit, notre bien-faire ; notre bien-être tourneront constamment et réciproquement à l’avantage de tous et toujours à notre propre avantage » (Voyez les Physiocrates de Daire, 1.1, pp. 383-385).

  1. Dupont, Notice abrégée, 1769, dans le Quesnay de l’édition Oncken, p. 152. — Sur les fondements de la morale chez les physiocrates et chez Quesnay en particulier, on peut lire le R. P. Pesch, S. J., Die philosophischen Grundlagen