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justice et d’impartialité. Les griefs soulevés sont les suivants :

1° L’inaction du gouvernement poussée jusqu’aux dernières limites.

On a voulu la trouver dans la maxime : « Laissez faire, laissez passer ». Il serait cependant plus juste de n’y voir que ce que les physiocrates y mettaient, c’est-à-dire une revendication énergique, mais nécessaire alors, de la liberté du commerce et de la liberté du travail.

En tout cas Quesnay, le véritable patriarche de la secte, pose en principe que le gouvernement doit favoriser une certaine orientation de l’activité et un certain emploi des revenus[1] ; il déclare que « l’autorité souveraine peut et doit instituer des lois contre le désordre bien démontré », en ayant soin, toutefois, de « ne pas empiéter sur l’ordre naturel de la société[2] » ; il consacre tout un long chapitre à ce qu’il appelle la « proscription de l’intérêt particulier exclusif[3] » ; enfin, il trace aux lois civiles positives un cadre qui nous semble laisser à l’État pleine liberté d’accomplir tout son devoir et de remplir toute sa mission[4].

  1. Maximes générales, VIIIe maxime : « . Que le gouvernement économique ne s’occupe qu’à favoriser les dépenses productives et le commerce des denrées du crû, et qu’il laisse aller à elles-mêmes les dépenses stériles. » — XXe maxime : « Qu’on ne diminue pas l’aisance des dernières classes de citoyens.., » — XXIIe maxime : « Qu’on ne provoque point le luxe de décoration… » — XXVIIe maxime : « Que le gouvernement soit moins occupé du soin d’épargner que des opérations nécessaires pour la prospérité du royaume… » — XXVIIIe maxime : « Que l’administration des finances, soit dans la perception des impôts, soit dans les dépenses du gouvernement, n’occasionne pas de fortunes pécuniaires qui dérobent une partie des revenus à la circulation, à la distribution et à la reproduction. »
  2. Despotisme de la Chine, ch. VIII, § 6 (Oncken, p. 642).
  3. Ibid., ch. VIII, § 21 (Oncken, pp. 655 et s.).
  4. « Les lois positives sont des règles authentiques établies par une autorité souveraine, pour fixer l’ordre de l’administration du gouvernement, pour assurer la défense de la société, pour faire observer régulièrement les lois naturelles, pour réformer ou maintenir les coutumes et les usages introduits dans la nation, pour régler les droits particuliers des sujets relativement à leurs différents états, pour déterminer l’ordre positif dans les cas douteux réduits à des probabilités d’opinion ou de convenances, pour asseoir les décisions de la justice distributive » (Droit naturel, ch. v). — Item, Despotisme de la Chine, ch. VIII, § 2, éd. Oncken, p. 637).