Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/156

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

idées fort justes sur les monnaies. Ses observations sur le pair ou les écarts du change, pour connaître si un pays est débiteur ou créancier de l’ensemble des autres pays, étaient certainement lues avec profit par ceux qui demandaient à la balance du commerce de leur révéler l’enrichissement ou l’appauvrissement relatif d’une nation[1].

Véron de Forbonnais[2], d’abord négociant, écrivit dans l’Encyclopédie les articles Change, Commerce et quelques autres, inspirés par le plus pur esprit mercantiliste. Non seulement, à l’en croire, un peuple ne s’enrichit que de ce que perdent les autres peuples, mais encore il faut bien savoir que les nationaux en achetant un produit étranger font perdre la valeur de l’acquisition, le salaire manqué des ouvriers indigènes, le prix des matières premières, les bénéfices que la circulation aurait donnés, et finalement les ressources diverses que le souverain aurait tirées de cette production. Les articles de Forbonnais furent réunis et publiés à part, en 1754, sous le titre Éléments du commerce.

Forbonnais, très prisé par Choiseul, qui lui demanda un plan de réorganisation des finances, puis par Silhouette, avec lequel il finit par se brouiller, publia, en 1758, ses Recherches et considérations sur les finances de la France de l’an 1595 jusqu’à l’an 1721. C’est là qu’on trouve les renseignements les plus abondants et les plus sûrs sur les finances françaises sous Henri IV, Louis XIII, Louis XIV et la Régence. En 1767, sous le titre Principes et observations économiques, Forbonnais fit une bonne critique, toute négative, du Tableau économique de Quesnay. Forbonnais y combattait avec logique et clarté, la thèse physiocratique de la stérilité de la classe industrielle ; mais par malheur il ne trouvait à substituer à cette doctrine que les lacunes et les vices de son propre système mer-

  1. Ch. III, art. 1-6.
  2. Véron de Forbonnais, né au Mans, en 1722, d’une ancienne famille d’industriels, qui fabriquaient un tissu appelé de leur nom vérone.