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tement la sortie du numéraire, puisque, sans professer une aversion systématique contre le commerce international, elle se borne à lui demander d’orienter son courant dans un certain sens plutôt que dans un certain autre.

Le principal théoricien du mercantilisme sous cette dernière forme est l’Anglais Thomas Mun, négociant qui avait fait le commerce avec les pays étrangers, et particulièrement avec la Toscane, et qui, sous forme de conseils à son fils, écrivit, probablement entre 1641 et 1651, son traité England’s treasure by forraign trade — or the ballance of our forraign trade is the rule of our treasure[1]. L’ouvrage ne fut imprimé qu’en 1664 après la mort de l’auteur[2].

Mun critique très judicieusement certains procédés, alors en faveur, que le mercantilisme ou plutôt le bullionnisme avait inspirés, et ces critiques nous sont d’autant plus précieuses qu’elles nous éclairent sur les faits. Ainsi, d’après lui, nous ne devons pas croire que nous nous enrichissions quand nous altérons notre monnaie pour la faire moins lourde ou moins pure[3] ; ou quand nous autorisons les monnaies étrangères à circuler chez nous à un cours légal qui dépasse celui de nos monnaies indigènes, eu égard aux quantités de métal fin renfermées dans les unes et les autres[4] ; ou quand nous pratiquons le système de la balance des contrats et que, ainsi, par le statute of employments nous exigeons, soit qu’une exportation de marchandises provoque un retour partiel de monnaie, soit qu’une importation de marchandises provoque exclusivement une exportation de marchandises[5] ; ou, enfin, quand nous interdisons la sous-évaluation (underevaluation) de notre mon-

  1. Le trésor de l’Angleterre par le commerce extérieur, ou la balance de notre commerce extérieur est la règle de notre trésor.
  2. Il en existe une traduction française de 1674. Nous citons, quant à nous, d’après l’édition anglaise de 1669 que nous possédons.
  3. Op. cit., ch. viii.
  4. Op. cit., ch. ix.
  5. Op. cit., ch. x et xi.