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en 1602, grand-maître des ports et havres de France en 1606, il fut fait encore duc de Sully.

Au cours de cette longue carrière, il releva l’agriculture et les finances, ruinées par les guerres extérieures et les guerres de religion.

Retiré dans ses terres à la suite de la mort d’Henri IV en 1611, il y fit rédiger les Économies royales par des secrétaires sous sa propre dictée. Une partie de ce vaste travail, n’allant que jusqu’en 1605, fut publiée pour la première fois en 1638 ; l’ensemble ne fut donné qu’en 1665, vingt-quatre ans après la mort de Sully. Par une bizarrerie sans exemple, Sully n’y parle de lui ni à la troisième personne comme César, ni à la première comme il est d’usage : ce sont ses secrétaires qui lui racontent à lui-même sa propre histoire, en entremêlant d’abondantes citations de pièces le narré qu’ils lui font de ses entretiens avec le roi.

Sully se fait remarquer par la prédominance qu’il accorde à l’agriculture, comme si les physiocrates devaient plus tard s’inspirer de lui, et par ses préjugés en faveur des lois somptuaires. Sa maxime favorite était que « labourage et pastourage sont les deux mamelles de la France, les vrayes mines et trésor du Pérou ». Sévère contre tout ce qui ressemblait à la prodigalité, il n’était pas même juste pour l’industrie. « On peut être assuré, disait-il, que si j’avais été cru, je n’aurais toléré ni les carrosses, ni les autres inventions de luxe, qu’à des conditions qui auraient coûté cher à la vanité. » Selon lui, on aurait dû nommer dans chaque juridiction des censeurs ou réformateurs pour dénoncer aux juges « tous pères, enfants de famille et telles autres personnes occupées de porter la dissolution au-delà des bornes de l’honneur et les dépenses superflues au-delà de leurs besoins », avec prise à partie contre les juges négligents et avec mise sous séquestre du tiers des biens des prodigues, en vue de l’acquittement forcé de leurs dettes. Sully aurait voulu également que tout prêt qui eût été considérable par rapport aux facultés de