Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/310

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Quand Hanoûmat, envoyé par toi, s’est montré la première fois dans Lankâ, où j’étais captive, pourquoi, héros, ne m’as-tu pas rejetée dès ce moment ? Aussitôt cette parole, vaillant guerrier, abandonnée par toi, j’eusse abandonné la vie à la vue même de ce noble singe. Tu n’aurais pas en vain subi tant de fatigue et mis ta vie en péril ; cette armée de tes amis ne se fût pas consumée en des travaux sans fruit.

« Mais, sous l’empire même de la colère, ce que tu mis avant tout, comme un esprit léger, monarque des hommes, ce fut ma qualité seule d’être une femme. J’étais née du roi Djanaka, appelée que je fusse d’un nom qui attribuait ma naissance à la terre ; mais, ni ma conduite, ni mon caractère, tu n’as rien estimé de moi. Ma main, qu’adolescent tu avais pressée en mon adolescence, tu ne l’as point admise pour garant ; ma vertu et mon dévouement, tu as tout rejeté derrière toi ! »

Sîtâ parlait ainsi en pleurant et d’une voix que ces larmes rendaient balbutiante ; puis, s’étant recueillie dans ses pensées, elle dit avec tristesse à Lakshmana : « Fils de Soumitrâ, élève-moi un bûcher ; c’est le remède à mon infortune : frappée injustement par tant de coups, je n’ai plus la force de supporter la vie. Dédaignée par mon époux, dans l’assemblée de ces peuples, je vais entrer dans le feu ; c’est la seule route ici qu’il m’est séant de suivre. »

À ces mots de la Mithilienne, l’intrépide meurtrier des héros ennemis, Lakshmana, flottant parmi les ondes de l’incertitude, fixa les yeux sur le visage de son frère ; et, comme il vit l’opinion de Râma se manifester dans l’expression de ses traits, le robuste guerrier fit un bûcher pour se conformer à sa pensée. En effet, qui que ce