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toute baignée de larmes, lui répondit en ces termes : « Si je me vois privée de mon Râma, je me noierai dans la Godâvarî, Lakshmana, ou je me pendrai, ou j’abandonnerai mon corps dans un précipice ! Ou j’entrerai dans un bûcher allumé de flammes ardentes ! Mais je ne toucherai jamais de mon pied même un autre homme que Râma ! » Quand Sîtâ eut dit ces mots à Lakshmana, elle se répandit en pleurs et se remit, bourrelée de chagrin, à battre des mains sa poitrine.

Alors, voyant ses larmes et la douleur étalée dans toutes les formes de sa personne, le fils de Soumitrâ essaya de consoler cette dame aux grands yeux, mais Sîtâ ne répondit pas même un seul mot à ce frère de son époux.


Le juste Lakshmana, l’esprit agité d’une grande peur, était parti après un dernier regard jeté sur la Mithilienne et marchait, pour ainsi dire, malgré lui. L’auguste Démon aux dix visages saisit aussitôt l’occasion favorable et se présenta devant la belle Vidéhaine sous la forme empruntée d’un anachorète mendiant. Il s’avança vers cette jeune et tendre femme, abandonnée par les deux frères, comme le voile d’une nuit obscure envahit la dernière lueur du jour en l’absence du soleil et de la lune. Alors, voyant cette beauté incomparable délaissée dans ce lieu solitaire, le monstre aux dix têtes, monarque de tous les Rakshasas, se mit à rouler cette pensée dans son esprit en démence :

« Voilà bien le moment pour moi d’aborder cette femme au charmant visage, pendant que son époux et Lakshmana même ne sont pas auprès d’elle ! »

Quand Râvana eut songé à profiter aussitôt de l’occa-