Aussitôt, mêlé au chant de voix mélodieuses, il se répandit au sein de l’atmosphère un son de tambours célestes, avec ces acclamations : « Bien ! bien ! » Une pluie de fleurs tomba au milieu du champ de bataille sur le front même de Râma, et l’on entendit le ciel crier à tous les points cardinaux : « Le scélérat est mort ! »
Depuis ce temps, Râma joyeux, entre Lakshmana et son épouse, qu’il avait rassurée, Sîtâ, aux yeux charmants de gazelle, coula dans cet ermitage une vie agréable, environné des honneurs que lui rendaient tous les ermites rassemblés autour de sa personne.
Quand Çoûrpanakhâ vit les quatorze mille Rakshasas tués, lorsqu’elle vit Doûshana, Triçiras et Khara tombés morts sur la terre, et que cet exploit, si difficile à beaucoup d’autres, Râma l’avait accompli seul, à pied, avec son bras d’homme, elle courut pleine d’épouvante à Lankâ soumise aux lois de Râvana, son frère. Là elle vit, assis entre ses conseillers, devant son char, comme le fils de Vasou au milieu des Maroutes, ce Râvana, le fléau du monde, trônant sur un siége d’or, élevé par-dessus tous et brillant à l’égal du soleil même, tel que le feu divin quand on l’a déposé tout flamboyant sur un autel d’or. Çoûrpanakhâ le vit, environné de sa cour admirable, avec ses dix visages, ses vingt bras, ses yeux couleur de cuivre et sa vaste poitrine ; elle le vit marqué des signes naturels où l’on reconnaît un roi, avec ses parures d’or épuré, ses longs bras, ses dents blanches, sa grande figure, sa bouche toujours béante, comme celle de la mort, héros semblable à une montagne, pareil aux nuées pluvieuses, invincible dans les combats aux magnanimes Rishis, aux Yakshas, aux Dânavas, aux Dieux mêmes.