mains réunies et le corps incliné, répondit en ces termes :
« Mon séjour ici fut agréable, saint anachorète, ce qu’il fut aussi pour mes conseillers, mon armée et mes chars : tu nous as pleinement rassasiés, bienheureux solitaire, de toutes les choses que l’on peut désirer. Je t’offre mes adieux ; donne-moi congé, s’il te plaît, saint anachorète ; je vais aller près de mon frère : daigne jeter sur moi un regard favorable. Dis-moi, bienheureux, ô toi, versé dans la science de la justice, quel chemin doit me conduire à l’ermitage de ce magnanime observateur de son devoir. »
À ces questions du magnanime Bharata, le sage et grand saint lui répondit en ces termes : « À trois yodjanas augmentés d’une moitié s’élève, ami Bharata, dans la forêt solitaire, le mont Tchitrakoûta, plein de grottes délicieuses et de murmurantes cascades.
« Son flanc septentrional est baigné par les eaux de la Mandâkinî, aux rives couvertes d’arbres en fleurs et peuplées d’oiseaux divers. Entre cette rivière et cette montagne, tu verras, bien défendue par elles deux, une chaumière au toit de feuillage. C’est là, ai-je entendu raconter, qu’il habite avec Sîtâ, son épouse, un riant ermitage construit dans ce lieu solitaire, de ses propres mains jointes aux mains de Lakshmana. »
Apprenant qu’on allait partir, les épouses du roi des rois descendirent aussitôt de leurs chars et décrivirent un pradakshina autour du brahmane digne de tous hommages. Kâauçalyâ tremblante, amaigrie, accablée de tristesse, prit dans ses deux mains les deux pieds de l’anachorète. En butte au mépris du monde entier pour son ambition échouée, Kêkéyî, le front couvert de rougeur, embrassa même les pieds du solitaire.