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À ces mots : « traversé le fleuve, » ils s’écrièrent, les yeux baignés de larmes : « Oh ! douleur ! » et, continuant à gémir : « Nous sommes frappés à mort ! » disaient-ils. Alors Soumantra entendit courir autour de lui ces mots proférés d’une bande à l’autre : « Il faut qu’il n’ait pas de honte, cet homme, qui revient ici, après qu’il a délaissé Râma au fond d’un bois ! Comment pourrions-nous, joyeux dans l’absence d’un prince, le plus noble des hommes, comment pourrions-nous, sans avoir dépouillé toute pitié, goûter encore le plaisir dans ces grandes fêtes, où l’on vient en foule de toutes parts ! Où sera désormais une chose agréable à ce peuple ? Quelle chose, d’où lui vienne un plaisir, peut-il maintenant désirer ? » Ainsi pensaient les foules de ce peuple autour de Soumantra, qui évitait de blesser personne avec son char. Il entendait aussi les voix des femmes, qui, accourues à leurs fenêtres, disaient : « Comment, ce malheureux ! il est revenu, après avoir quitté Râma ! »

Le cocher, navré de chagrin, avait recueilli dans sa route ces paroles et d’autres mots semblables, quand il arriva au palais, où le roi Daçaratha fixait sa résidence. Descendu promptement de son char, il entra dans l’habitation royale aux sept enceintes, mais dépouillée maintenant de son auguste splendeur et toute pleine d’une cour noyée dans la douleur.

Le roi jeta un regard de ses yeux noyés de pleurs à Soumantra, qui s’avançait les mains jointes, et fit ces questions au cocher tout couvert encore de la poussière du char : « Où est allé Râma ? dis-moi, Soumantra ! où va-t-il habiter ? En quel lieu était ce digne enfant de Raghou, quand il t’a quitté ? Comment, élevé avec une extrême délicatesse, mon fils pourra-t-il supporter de