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« Ce grand roi qui a donné sa foi à la vérité, pour qui le devoir est une science bien connue, de qui les actes sont pleinement accompagnés de réflexion, s’engage à mettre les objets d’une grâce dans mes mains : Dieux, je vous en prends donc à témoins ! »

Quand la reine eut ainsi enveloppé ce héros au grand arc dans le réseau du serment, elle tint ce discours au monarque, dispensateur des grâces, mais aveuglé par l’amour :

« Jadis, ô roi, satisfait de mes soins, dans la guerre, que les Dieux soutenaient contre les Démons, tu m’as octroyé deux grâces, dont je réclame aujourd’hui l’accomplissement. Que Bharata, mon fils, reçoive l’onction royale, comme héritier du trône, dans la cérémonie même que tes soins préparent ici pour associer Râma à la couronne. En outre, que celui-ci, portant le djatâ, la peau de biche et l’habit d’écorce, s’en aille dans les bois durant neuf et cinq ans : voilà ce que je choisis pour mes deux grâces. Si donc tu es vrai dans tes promesses, exile Râma dans les forêts et consacre Bharata, mon fils, dans l’hérédité du royaume. »

Ce langage de Kêkéyi blessa au cœur le puissant monarque, et son poil se hérissa d’effroi, comme sur la peau d’une antilope mâle, quand il voit la tigresse devant lui. S’affaissant aussitôt sous le coup de cette grande douleur, il tomba hors de lui-même sur terre veuve de ses tapis. « Hélas ! s’écria-t-il, ô malheur ! » À ces mots, en proie à sa douleur, il tomba sur la terre, et, blessé au milieu du cœur par la flèche des cruelles paroles, il fut à l’instant même absorbé dans un profond évanouissement. Longtemps après, quand il eut repris connaissance, l’âme noyée dans l’affliction, il dit, plein de tristesse et