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À peine eut-elle ouï ces mots de la reine, Mantharâ, bien résolue dans sa pensée coupable, tint ce langage à Kêkéyi pour la ruine de Râma : « Écoute, et réfléchis bien, quand tu m’auras entendue. Jadis, au temps de la guerre entre les Dieux et les Démons, ton invincible époux, sollicité par le roi des Immortels, s’en fut affronter ces combats. — Il descendit, vers la plage méridionale, dans la contrée nommée Dandaka, où le Dieu qui porte à son étendard l’image du poisson Timi possède une ville appelée Vêdjayanta.

« Là, non vaincu par les armées célestes, un grand Asoura, qui avait nom Çambara, puissant par la magie, livra bataille à Çakra. Dans cette terrible journée, le roi fut blessé d’une flèche ; il revint ici victorieux ; et ce fut par toi, reine, qu’il fut pansé lui-même. La plaie, grâce à toi, fut cicatrisée ; et, ravi de joie, l’auguste malade t’accorda, femme illustre, deux faveurs à ton choix. Mais toi : « Réserve l’effet de ces deux grâces pour le temps où j’en souhaiterai l’accomplissement ! » N’est-ce pas ainsi qu’alors tu parlas à ton magnanime époux, qui te répondit : Oui ? J’étais ignorante de ces choses, et c’est toi, qui jadis, reine, me les a contées.

« Réclame de ton époux ces deux grâces ; demande pour l’une le sacre de Bharata et pour l’autre l’exil de Râma pendant quatorze années. Montre-toi courroucée, ô toi, de qui le père est un monarque, entre dans l’appartement de la colère ; et, vêtue d’habits souillés, couchée sur la terre nue, ne jette pas un regard de tes yeux sur le roi, ne lui adresse pas même une parole, comme une abandonnée qui dort sur la terre, femme qu’on nommait hier la brillante et qu’il faut appeler maintenant la désolée. Bientôt, près du sol dégarni, où tu seras