Page:Ramayana, trad. Roussel, tome 2.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
RAMAYANA

11. Qui pénétrez dans la forêt Dandaka armés de traits, d’arcs et d’épées, d’où vient que vous, ascètes, vous séjournez ici avec une femme ?

12. Pervers, méchants, qui donc êtes-vous, ascètes de malheur ? Moi je suis le Râkshasa Virâdha et cette forêt inaccessible,

13. Je la parcours sans cesse avec mes armes, pour me nourrir de la chair d’ascètes. Cette femme aux belles formes sera mon épouse.

14. Pour vous deux, scélérats, je boirai votre sang dans le combat. Cette parole cruelle et audacieuse de Virâdha à l’âme perverse,

15. Lorsqu’elle l’entendit, effrayée, la fille de Janaka, Sîtâ, dans son épouvante, trembla comme au souffle de l’ouragan la Kadalî.

16. Râghava, à l’aspect de la belle Sîtâ que Virâdha emportait dans son giron, dit à Lakshmana, le visage défait :

17. Ami, vois la fille du roi Janaka, mon épouse resplendissante de beauté, que Virâdha tient entre ses bras,

18. Elle, cette glorieuse princesse élevée au sein d’une constante félicité ! Ce qu’elle avait souhaité qui nous arrivât, le vœu qui lui était cher,

19. Kaikeyî l’obtient complètement et sans tarder, aujourd’hui même, Lakshmana. L’intronisation ne lui suffit pas pour son fils, à (cette femme) aux longues visées.

20. Elle me fait reléguer dans la forêt, malgré l’amour universel (des peuples) pour moi. Maintenant, la voilà (qui sera) satisfaite, elle qui tient le milieu parmi mes mères.

21. Le rapt de Vaidehî est le plus grand de mes malheurs ; (il est pire) que la mort de mon père, ô Saumitri, et que la perte de la couronne.

22. À ces paroles de Kâkutstha, Lakshmana, noyé de larmes de douleur, répondit en colère et soufflant comme un reptile blessé.

23. Pourquoi le désoler comme si tu étais sans défenseur, toi le défenseur des êtres, l’émule de Vâsava, lorsque je suis à ton service, ô Kâkutstha ?

24. Frappé à l’instant du trait que (je vais lui lancer) dans ma fureur, le Rakshas Virâdha va périr, et la terre boire son sang.

25. Le courroux que je ressentis contre Bharata pour sa compétition au trône, je le déchargerai sur Virâdha, comme le dieu qui porte la foudre (décharge) son arme sur un mont.

26. Brandi avec force par mon bras vigoureux, puisse ce dard énorme