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presqu’à bout touchant, sur ce malheureux vieillard ; trois balles l’atteignent, cependant il n’est pas tué ; mais son jeune domestique tombe mort à ses côtés. Il reste au vieillard assez de force pour défendre sa vie ; il met en joue ces brigands, le coup ne part pas ; alors la troupe l’investit, on veut le massacrer ; l’un d’eux, plus prudent, les arrête, parce qu’il craint que les 150 esclaves du vieillard, qu’ils aiment comme leur père, ne viennent venger sa mort.

Malgré ses blessures, on conduit à pied ce vieillard à trois lieues de son habitation. Rendu au bourg d’Aquin, on veut lui couper la tête ; cependant on ne trouve dans les papiers qui ont été saisis chez lui et chez les deux autres absens, aucune preuve qui puisse le faire condamner, et il est enfin relâché.

Des scènes semblables se répètent dans presque tous les quartiers de la colonie, et les hommes de couleur étonnés, effrayés, n’osent plus ni se rencontrer ni se parler. Un ordre de l’assemblée coloniale est donné pour qu’ils ne puissent plus sortir armés sans une permission des blancs. De quoi cependant les hommes de couleur étoient-ils coupables pour éprouver ces traitemens ? Ils avoient demandé, dans les termes les plus soumis, d’être réintégrés dans leurs droits.