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rougir, elle tremble à votre seule approche. Ce n’est pas vous qu’on doit plaindre.

— J’ignore si je suis à plaindre ou à envier ; ce que je sais, c’est que si je lui portais jamais mes vœux, je n’aurais pas la douleur de la voir rire d’un sentiment qui doit faire la joie et l’orgueil de la femme.

— Oh ! ceci me paraît tant soit peu prétentieux de la part des hommes.

— Eh quoi ! l’amour n’est-il pas le but suprême de la femme ? et ne doit-elle pas se sentir heureuse et fière d’avoir su mériter les hommages d’un homme, d’avoir conquis ses affections, son amour ?

— À mon sens, la femme a le droit autant que l’homme d’exiger ces sentiments dans celui qu’elle a su remarquer et à qui elle a daigné le faire comprendre.

— Je vous l’accorde.

— C’est heureux. Allons, je vois que vous n’aimez pas qu’on rie des choses sérieuses. Je tâcherai de me corriger de ce vilain défaut. Êtes-vous content ?

— Miss, je suis confus de la vivacité de mes paroles. Excusez-moi.

Quand elle se fut éloignée, ma pensée s’envola vers ma chère Pia, que rien ne pouvait me faire oublier, et en la comparant à miss Margaret, je me sentais l’aimer davantage ; je me reprochais de l’avoir quittée sans lui rien dire, et je me promettais d’aller prochainement la revoir. Vous voyez que tous mes beaux projets s’étaient évanouis. Je l’aimais plus que je ne l’avais cru.

Depuis notre petite altercation, miss Margaret n’était plus la même femme. Son ca-