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aventures, plus ou moins innocentes, que pouvait offrir la vie de la classe moyenne à la campagne ; et, en mère habile, elle arrive toujours à les marier avec un homme de fortune supérieure. Nous allons montrer, dans une rapide exposition des sujets de ses romans, comment elle sait utiliser toutes les petites intrigues de salon, tous les petits incidents des pique-niques en plein air, pour accentuer les particularités des caractères, indiquer le développement d’un sentiment, déployer le conflit des passions.



Orgueil et Préventions


C’est dans Orgueil et Préventions, le premier et le plus célèbre de ses romans, que nous pouvons le mieux saisir ses procédés. L’auteur débute en nous rappelant que : « C’est une vérité universellement admise qu’un célibataire qui a de la fortune ne peut se passer d’une femme. Si peu connus que puissent être ses sentiments ou ses vues, quand il s’installe dans une nouvelle résidence, cette vérité est si bien enracinée dans l’esprit des familles voisines, qu’il est immédiatement considéré comme la légitime propriété de l’une ou l’autre de leurs filles. » On devine donc l’agitation provoquée dans la bonne société de Meryton par la nouvelle qu’un jeune homme très riche, Bingley, vient de louer Netherfield Park, la plus grosse propriété du pays. Toutes les mères qui ont des filles à marier sont hors d’elles, ébauchent les plus beaux rêves, dressent les plans les plus machiavéliques ; et Mrs. Bennet est la plus surexcitée.

C’est une femme dépourvue d’intelligence, de sensibilité et de tact, intéressée uniquement dans les potins de sa petite ville. Elle a cinq filles dont les trois dernières ont hérité de sa bêtise et de sa frivolité. En l’absence de garçon, la propriété de Mr. Bennet doit revenir à un cousin, le Révérend Mr. Collins ; et, à la mort du père, la