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Dans le long intervalle qui séparait les bals de Basingstoke, la famille Austen se transformait en troupe dramatique, et jouait de petites comédies en vogue, auxquelles James Austen ajoutait des prologues et des épilogues pleins d’esprit. Le salon servait de théâtre en hiver ; en été on préférait une grange qui pouvait recevoir un plus grand nombre d’invités, choisis parmi les amis de la famille. La principale actrice était Mme de la Feuillade, nièce de Mr. Austen, mariée à un comte français, une charmante femme plus parisienne qu’anglaise, et à laquelle Jane était redevable de sa parfaite connaissance du français. La jeune comtesse faisait les délices de ses cousins par sa vivacité, sa gaieté et son talent de comédienne. Les répétitions favorisaient les flirts ; et quelques années plus tard, quand les terroristes l’eurent rendue veuve, la jolie Mme de la Feuillade épousa Henry Austen, le quatrième fils du recteur. C’est sans doute le souvenir du théâtre d’amateurs de la maison paternelle qui, vingt ans plus tard, inspirait à Jane Austen, l’idée de grouper autour d’une comédie de salon, les rivalités des personnages de Mansfield Park.

Mais littérature, théâtre, toilettes, et parties de plaisir n’empêchaient pas la future romancière d’être une parfaite femme d’intérieur. Elle excellait dans tous les petits ouvrages féminins et Mrs. Austen était très fière d’avoir une fille qui savait tout faire. « Maman désire que je te dise que je suis une très bonne ménagère » écrit Jane à sa sœur Cassandra en 1798. « Je le fais volontiers, car je crois que c’est là mon point fort, et je vais t’en donner la raison. J’ai toujours soin de servir les choses que j’aime particulièrement ; c’est d’après moi, le principal avantage de s’occuper du ménage. J’ai eu quelques blanquettes de veau et j’aurai un haricot de mouton demain. Nous allons bientôt tuer un cochon ». On voit que l’existence au presbytère