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cour, le galant Mr. Collins interrompt sa cousine d’un impérieux geste de la main :


— « Je n’en suis pas à apprendre », dit-il, « que c’est l’habitude des jeunes filles de rejeter les demandes en mariage qu’un homme fait pour la première fois, tout en ayant cependant l’intention d’accepter. Je sais que ce refus peut être répété une seconde et même une troisième fois. Je ne suis donc pas découragé ; et je n’attribue votre refus qu’à votre désir d’augmenter mon amour par l’attente, suivant la pratique habituelle des jolies femmes ».


Délicieux Mr. Collins ! Il est comique sans être trop exagéré et ses ridicules ne sont pas invraisemblables. Il dit tout haut ce que pensent tout bas beaucoup de jeunes gens ; et un Herr Doctor, dressé à la chasse au symbolisme, n’aurait besoin que de quelques pages pour nous faire voir en Lady Catherine de Bourgh la personnification de la belle carrière, du brillant avenir, qu’il ne faut pas compromettre par une alliance susceptible de déplaire aux grands chefs, et dans la confiance en lui-même du révérend recteur la vertu fondamentale de quiconque est fonctionnaire de l’État ou ministre de la religion.

Son collègue, Mr. Elton [1], n’est pas moins amusant. Il a un peu plus de bon sens, moins de platitude, et sa fatuité est d’un autre genre. C’est le jeune et beau pasteur. Sa parole aisée, son sourire onctueux, ses manières galantes, ont gagné le cœur de toutes ses paroissiennes : « il est très recherché, et tout le monde dans le village reconnaît que, s’il le voulait, il pourrait ne jamais manger chez lui, et qu’il a plus d’invitations à dîner qu’il n’y a de jours dans la semaine ». Il se sait joli garçon, se croit plus spirituel qu’il n’est, et veut tirer parti de tous ces avantages. Il y réussit : « il gagne une femme

  1. Emma.