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l’état de son cœur ; mais elle se demande avec terreur comment Harriet supportera cette nouvelle déception. La voilà justement qui arrive, toute joyeuse. Elle vient de rencontrer Mr. Weston, elle sait tout, et elle n’en paraît nullement émotionnée. Emma l’interroge : l’homme tellement supérieur, celui qui l’a tirée d’une situation si pénible, ce ne serait pas Mr. Churchill ? Harriet proteste contre une telle suggestion, elle a meilleur goût, c’est à Mr. Knightley qu’elle pensait ; le service inestimable, c’est de l’avoir invitée à danser alors qu’elle restait seule et sans cavalier en face de Mr. Elton ironique et méprisant. D’ailleurs, elle se croit sûre d’être aimée, car Mr. Knightley lui a donné dernièrement de grandes marques d’amitié.

Emma est atterrée ; elle marierait volontiers Harriet au plus riche et au plus noble gentilhomme du comté, mais pas à Mr. Knightley. À cause du petit Harry ? Emma se moque bien maintenant des droits du petit Harry à l’héritage de son oncle. La vérité, c’est qu’elle « ne pourra jamais supporter que Mr. Knightley en épouse une autre qu’elle ».

Mr. Knightley, qui lui aussi croit Emma éprise du fils de Mr. Weston, accourt pour la consoler. Rassuré, il confesse alors envier le sort de Frank Churchill. Miss Woodhouse s’inquiète, à qui songe-t-il ? À Harriet ? Non, c’est Emma qu’il aime ; il n’a invité Harriet que par pitié, il n’a été empressé vis-à-vis d’elle que pour la ramener à Mr. Martin, son fermier préféré. Ainsi tout s’arrange pour le mieux ; il suffit de mettre Mr. Martin sur le chemin d’Harriet pour la ramener à son premier amour, et Mr. Knightley épouse Emma.

Tout le monde est satisfait, sauf Mrs. Elton, qui se voit enlever définitivement par Mrs. Knightley le premier rang dans la société d’Highbury. Elle s’en venge en prédisant à ce « pauvre Knightley » bien des désagréments dans son futur ménage.