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provinces du nord, privées d’eau, sont moins fertiles que celles du sud, où les rivières sont abondantes. Parmi les céréales qui figurent principalement dans les récoltes, on compte le froment, l’orge et le maïs. Les deux premiers viennent de roulo, c’est-à-dire sans irrigation, sur presque tous les points du territoire. L’exportation des grains ne se fait pas sur une grande échelle. Le Pérou, qui est le marché principal, en reçoit tout au plus cent mille hectolitres ; le pays conserve donc un surcroît immense d’approvisionnements, et le manque de débouchés empêche les cultivateurs de donner une plus grande extension à cette branche de l’agriculture.

Les haciendas et les mines sont, on le voit, les principaux foyers de la production nationale au Chili. L’industrie manufacturière est nulle. Si on passe maintenant des campagnes aux villes, aux centres intellectuels du pays, on trouve les symptômes d’activité régulière qui nous ont frappé dans l’ordre matériel. Tout semble calculé d’ailleurs pour favoriser cette activité, pour la diriger surtout vers les paisibles conquêtes des lettres et des sciences. Les inconvénients qu’entraînent dans un petit État les prétentions militaires n’existent pas au Chili. L’effectif de l’armée régulière est fort réduit. Trois ou quatre escadrons de cavalerie, le même nombre à peu près de bataillons d’infanterie, enfin quelques brigades d’artillerie légère, voilà tout. Pendant la dernière guerre, cet effectif ne s’élevait qu’à dix mille hommes. Une garde nationale très-bien organisée fait presque partout le service des villes, service facile dans un pays où les turbulents forment aujourd’hui une imperceptible minorité. La marine est représentée par une frégate souvent désarmée et trois ou quatre goëlettes.

Faut-il attribuer à cette prédominance de la vie civile sur la vie militaire le goût croissant qui se manifeste dans la jeu-