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velles bases, grâce à la main habile et forte de Portalès, placé pendant quelques années à la tête du ministère. Aussi l’ordre devint-il une habitude au Chili. Ces agitateurs qui dans toutes les autres républiques méridionales cherchent fortune à travers les troubles révolutionnaires de chaque jour, durent renoncer à la carrière politique, ou l’accepter avec les devoirs sévères, les travaux assidus qu’elle impose. Ces devoirs, ces travaux, ne pouvaient se concilier désormais avec leurs menées, leurs prétentions remuantes. Aussi les emplois politiques, si recherchés dans les autres États de l’Amérique méridionale, sont-ils très-souvent refusés au Chili. Le général Prieto, qui avait été nommé par le congrès, resta président de la république jusqu’en 1835. On voulut alors presque unanimement élire Portalès, mais celui-ci déclina cet honneur, et contribua de tous ses efforts à la réélection de Prieto.

Quelques mois après survint avec le Pérou et la Bolivie une rupture qui eut de graves résultats. Le général Santa-Crux, renouvelant une ancienne idée de Bolivar, avait uni, par une confédération dont il était le chef, le Pérou et la Bolivie. Il rêva bientôt un pouvoir plus étendu. Santa-Crux avait momentanément donné la paix au Pérou, depuis longtemps en proie à la guerre civile, et il espérait, en fomentant des troubles au Chili[1], faire désirer, au milieu des tumultes et des désordres, l’intervention de son génie pacificateur. Il commença d’abord par accueillir les exilés chilenos, puis il leur prêta des armes et mit à leur disposition des navires de guerre. Le général Freire, à la tête de ces proscrits, fit une descente à Chiloë. Portalès sut défendre son pays comme il avait su le gouverner ; il vint bientôt à bout des révolutionnaires, et la république du Chili déclara la guerre à Santa-Crux.

On organisa l’armée à Quillota, près de Valparaiso ; mais

  1. Telle est du moins l’opinion dominante dans le pays.