Page:Radiguet - Souvenirs de l’Amérique espagnole, 1856.djvu/30

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cheveux noirs, épais et rudes, un front étroit et bas, des yeux relevés légèrement vers les tempes, des mâchoires saillantes, révèlent le sang indien. Des sourcils d’une courbure gracieuse, des yeux mobiles, lumineux et fendus en amande, un nez mince, une main fine, un pied petit, caractérisent l’origine espagnole. La diversité des races se révèle aussi par les nuances de la peau. Parmi les femmes réunies le dimanche au Castillo, les unes sont vigoureusement colorées comme le cuivre, les autres semblent dorées par un rayon de soleil ; celles-ci sont pâles comme des roses thé, celles-là ont la douce fraîcheur des roses du Bengale ; s’il y a quelque différence dans la couleur des chevelures, il n’y en a point dans celle des yeux, qui sont généralement noirs. La tournure des Chilenas ne répond pas toujours à la finesse gracieuse de leur physionomie. On cherche en vain sur le Castillo ces tailles souples, élégantes ou fièrement cambrées, si communes dans les anciennes colonies espagnoles. Celui qui n’aurait vu les femmes de Valparaiso que sur la chaussée du Castillo serait donc tenté de mêler certaines restrictions aux éloges que leur ont si complaisamment décernés la plupart des voyageurs ; mais convient-il de s’en rapporter à cette première impression, et ne vaut-il pas mieux suivre les Chilenas dans les salons, leur vrai théâtre ? Ce sera aussi connaître la vie de Valparaiso sous son plus séduisant aspect.


II

La présentation d’un étranger dans une famille de Valparaiso n’offrait, il y a quelques aimées, aucune difficulté ; il s’y introduisait pour ainsi dire sans patronage, recevait presque toujours un aimable et bienveillant accueil, et arrivait rapidement à l’intimité. Aujourd’hui encore, l’accès d’un salon est aisé ; mais une plus grande rigidité de mœurs et le